#WrestleBudapest

#WrestleBudapest : l'Ukraine remporte deux médailles d'or lors d'une journée riche en émotions

By Vinay Siwach

BUDAPEST, Hongrie (1er avril) -- Alina HRUSHYNA AKOBIIA (UKR) faisait partie de l'équipe ukrainienne de 22 membres qui s'est réunie à Lviv, Ukraine le 10 mars.

Après un voyage traumatisant de 3 jours par la route, elle a atteint Lviv et, avec l'équipe, est restée dans la ville durant quatre jours avant de partir pour Budapest, en Hongrie, pour un camp d'entraînement. Mais comme ils laissaient leurs maisons et familles derrière eux, aucun d'eux n'a pu se concentrer sur l'entraînement à Budapest avant les championnats européens.

Personne ne savait s'ils pourraient retourner un jour chez eux et, comme Akobiia, d'autres lutteuses ont passé des jours plein d'émotion à s'entraîner à Budapest.

Ces souvenirs ont ressurgi lorsqu'Akobiia a remporté la première médaille d'or du tournoi pour l'Ukraine et que les chants d' 'Ukarina, Ukarina' ont envahi le Bok Sports Hall.

“Je n'arrive toujours pas à croire que j'ai remporté la médaille d'or du championnat d'Europe senior," a déclaré Akobiia. "J'ai traversé une période difficile et beaucoup de gens m'ont aidé. Mais maintenant, c'est toute l'Ukraine qui m'a aidée. Je suis vraiment heureuse."

Akobiia a assommé la médaillée de bronze de Tokyo Evelina NIKOLOVA (BUL) en finale des 57kg pour remporter la première médaille d'or du tournoi pour son pays. Elle était menée 2-2 quand Akobiia a fait trébucher Nikolova pour quatre points à  39 secondes de la fin. Elle a gagné la finale, 6-2.

Nikolova était sur une incroyable série de sept victoires par tombé et il semblait qu'Akobiia serait sa dernière victime mais l'Ukrainienne a réussi à maîtriser r Nikolova au bon moment.

C'était la toute première médaille d'or d'Akobiia aux championnats senior et elle n'aurait pas pu être plus spéciale puisqu'elle a dédié la médaille à l'Ukraine.

"Je veux dédier ma médaille d'or à mes parents et à ma patrie, l'Ukraine. Ce sont les choses les plus proches de moi," a-t-elle déclaré.

Le fait que l'équipe n'avait pas de lieu pour s'entraîner avant d'être autorisée à s'entraîner à Budapest a rendu encore plus incroyable l'exploit de la jeune femme de 22 ans. 

“C'était très difficile de se préparer mentalement," a-t-elle déclaré. "Parfois j'abandonnais mais ensuite je croyais à nouveau en moi. Mes amis ne m'ont pas laissée perdre courage. J'ai cru jusqu'au bout que je pouvais y arriver."

"Personne n'avait même prévu d'aller aux championnats d'Europe, nous voulions juste sauver nos vies. Ma famille est toujours là-bas et nous nous inquiétons beaucoup pour eux. Mais je suis ici et je suis heureuse d'avoir prouvé que je suis la plus forte dans cette catégorie de poids."

Tetiana RIZHKOTetiana RIZHKO (UKR) fait tomber Elis MANOLOVA (AZE) en finale des 65kg. (Photo: UWW / Kadir Caliskan)

La seconde médaille d'or de l'équipe est allée à Tetiana RIZHKO (UKR) qui a mis à terre l'athlète olympique de Tokyo Elis MANOLOVA (AZE) en deux minutes pour remporter sa première médaille d'or européenne senior. Cette médaille de Rizhko a provoqué une nouvelle vague de réactions d'émotion non seulement au sein de l'équipe d'Ukraine mais aussi dans le stade.

"il m'a fallu quatre jours pour atteindre Lviv, ensuite nous sommes restés sur place trois jours car nous ne pouvions pas partir, ensuite nous sommes venus ici en Hongrie, nous avons passés deux semaines dans un camp d'entraînement," a déclaré Rizhko. "L'association de lutte nous a beaucoup aidés, les entraîneurs de l'équipe nationale qui ont organisé ce voyage. Nous avons deux médailles d'or."

En parlant de sa finale, l'Ukrainienne a déclaré qu'elle ne s'attendait pas à tomber.

"Je ne m'attendais pas à la faire tomber aussi vite car la finale était difficile, il y a une compétition élevée dans ma catégorie de poids," a-t-elle déclaré. "Je suis remplie d'émotions. Je suis si heureuse que nous ayons de tels entraîneurs et des filles qui sont venues ici avec nous."

L'équipe est accompagnée par les championnes du monde 2014 Yulia TAKCH (UKR), la médaillée de Tokyo KOLIADENKO (UKR), Tetyana KIT (UKR) et Oksana LIVACH (UKR) entre autres.

Depuis que l'équipe est composée d'un mélange de jeunes lutteuses également, les lutteuses senior ont dû s'occuper des plus jeunes.

"Je devais distraire les filles les plus jeunes afin qu'elles ne pensent pas à ce qui se passe," a déclaré Livach. "Nous avons dû traverser de nombreuses épreuves et rester dans des abris pendant deux semaines. C'était très émouvant pour tout le monde à l'entraînement."

Mais elles ont oublié les temps difficiles, bien que momentanément, puisque la cérémonie d'équipe s'est déroulée.

"Quand le drapeau de l'Ukraine s'est levé, tout ce à quoi je pouvais penser était ce que les filles avaient fait pour arriver là," a déclaré Takch. "La seconde place est toujours la première pour nous."

Emma MALMGRENLa championne du monde junior Emma MALMGREN (SWE) a remporté l'or en 53kg à Budapest. (Photo: UWW / Kadir Caliskan)

Dans les autres finales, la championne du monde junior Emma MALMGREN (SWE) a battu la triple championne olympique Maria PREVOLARAKI (GRE), 3-2, pour remporter la médaille d'or en 53kg. 

Malmgren, 22 ans, menait Prevolarki 2-2 à la pause mais elle obtenu un point pour inactivité de Prevolaraki pour mener 3-2 en seconde période.

Elle a conservé cette avance jusqu'à la fin pour remporter la première médaille d'or suédoise aux Championnats d'Europe seniors après quatre ans.

"C'est irréel pour moi de me tenir là," a-t-elle déclaré. "C'était un rêve pour moi et j'ai travaillé tellement dur pour en arriver là. Alors ça fait du bien de rentrer à la maison avec la médaille d'or."

Malmgren avait dans son coin Yuliya RATKEVICH (AZE), qui a lutté contre la lutteuse grecque aux Jeux Olympiques de Londres et, avant la finale, ont eu une discussion sur la façon d'aborder la "vétéran".

"Nous avions un bon plan avant le match et je l'ai respecté," a-t-elle déclaré. "Elle [Ratkevich] m'a dit beaucoup de chose sur elle et je suis heureuse qu'elles soient ici avec moi. Sofia [MATTSSON] au téléphone. C'était très bien."

Malmgren a fait un excellent tournoi puisqu'elle a remporté son premier combat 12-2 et la demi-finale par tombé. Après un tournoi décevant à Istanbul où elle a été mise à terre, elle s'est bien reprise.

"Je suis satisfaite de ma lutte pendant ces deux jours," a-t-elle déclaré. "J'étais très déçue après Istanbul et un peu préoccupée. Maintenant, je me sens très heureuse du résultat. Nous avons de nouveaux entraîneurs en Suède et je vais commencer à travailler avec eux et continuer à les accompagner dans les camps à travers le monde."

Taybe YUSEINTaybe YUSEIN (BUL) a remporté sa première médaille d'or depuis 2019 aux championnats d'Europe. (Photo: UWW / Kadir Caliskan)

En 62kg, la médaillée de bronze de Tokyo Taybe YUSEIN (BUL) a réussi à remporter l'or avec une victoire confortable 7-0 sur Luisa NIEMESCH (GER). Elle a maintenu la pression sur son adversaire allemande et n'a jamais semblé en difficulté.

"J'ai été privé de l'or pendant deux ans aux championnats européens," a déclaré Yusein. "C'était bien pour moi de revenir et de gagner l'or. Mon plan était de tirer avantage des erreurs de mon adversaire. C'était un grand combat."

Anna SCHELLAnna SCHELL (GER) a donné à l'Allemagne sa première médaille d'or depuis 2007. (Photo: UWW / Kadir Caliskan)

Anna SCHELL (GER) a donné à l'Allemagne sa seule médaille d'or du tournoi en épinglant Buse TOSUN (TUR) en 72kg. il s'agit de sa deuxième victoire consécutive sur la lutteuse turque et elle sera désormais la lutteuse numéro un d'UWW en 72kg.

"C'est la deuxième finale car, à Istanbul, je l'ai rencontrée en demi-finale. Aujourd'hui, c'était le deuxième combat contre elle et c'est génial de gagner," a déclaré Schell.

Non seulement elle a mis fin à 15 ans d'attente de l'Allemagne pour une médaille d'or en lutte féminine aux Championnats d'Europe, mais Schell a également atteint un record personnel. L'or à Budapest était le premier de sa carrière internationale.

"C'est incroyable car je n'ai pas de médaille d'or en compétition internationale," a déclaré Schell.

La turquie a remporté son premier titre par équipe en lutte féminine avec 140 points tandis que l'Ukraine termine deuxième avec 135 points. la Bulgarie est troisième dans la course.

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Résultats en lutte féminine

53kg
OR : Emma MALMGREN (SWE) contre Maria PREVOLARAKI (GRE), 3-2

BRONZE : Iulia LEORDA (MDA) contre Zeynep YETGIL (TUR), 3-2
BRONZE : Katarzyna KRAWCZYK (POL) contre Liliia MALANCHUK (UKR), 14-4 

57kg
OR : Alina HRUSHYNA AKOBIIA (UKR) contre Evelina NIKOLOVA (BUL), 6-2

BRONZE : Tamara DOLLAK (HUN) contre Elvira KAMALOGLU (TUR), 7-2
BRONZE : Sandra PARUSZEWSKI (GER) df Anhelina LYSAK (POL), 4-2

62kg
OR : Taybe YUSEIN (BUL) contre Luisa NIEMESCH (GER), 7-0

BRONZE : Natalia KUBATY (POL) contre Yagmur CAKMAK (TUR), 10-0
BRONZE : Ilona PROKOPEVNIUK (UKR) contre Anna FABIAN (SRB), par blessure.

65kg
OR : Tetiana RIZHKO (UKR) contre Elis MANOLOVA (AZE), par tombé
BRONZE : Kriszta INCZE (ROU) contre Sofiya GEORGIEVA (BUL), 4-3

Classement final
OR : Tetiana RIZHKO (UKR)
ARGENT : Elis MANOLOVA (AZE)
BRONZE : Kriszta INCZE (ROU)

72kg
OR : Anna SCHELL (GER) contre Buse TOSUN (TUR), par tombé

BRONZE : Kendra DACHER (FRA) contre Eleni PJOLLAJ (ITA), par tombé
BRONZE : Yuliana YANEVA (BUL) contre Alexandra ANGHEL (ROU), 3-3

Résultats demi-finales GR 

55kg
OR : Eldaniz AZIZLI (AZE) vs Nugzari TSURTSUMIA (GEO)

Demi-finaliste 1: Eldaniz AZIZLI (AZE) contre Rudik MKRTCHYAN (ARM), 7-3
Demi-finaliste 2: Nugzari TSURTSUMIA (GEO) contre Artiom DELEANU (MDA), 9-0

63kg
OR: Taleh MAMMADOV (AZE) vs Leri ABULADZE (GEO)

Demi-finaliste 1 : Taleh MAMMADOV (AZE) contre Hrachya POGHOSYAN (ARM), 3-1
Demi-finaliste 2 : Leri ABULADZE (GEO) cpntre Etienne KINSINGER (GER), 6-2

77kg
OR : Malkhas AMOYAN (ARM) vs Yunus BASAR (TUR)

Demi-finaliste 1 : Malkhas AMOYAN (ARM) contre Per OLOFSSON (SWE), 9-0
Demi-finaliste 2 : Yunus BASAR (TUR) contre Aik MNATSAKANIAN (BUL), 5-3

87kg
OR : Nicu OJOG (ROU) vs Turpan BISULTANOV (DEN)

Demi-finaliste 1 : Nicu OJOG (ROU) contre Islam ABBASOV (AZE), par tombé
Demi-finaliste 2 : Turpan BISULTANOV (DEN) contre Mirco MINGUZZI (ITA), 10-0

130kg
OR : Danila SOTNIKOV (ITA) vs Riza KAYAALP (TUR)

Demi-finaliste 1 : Danila SOTNIKOV (ITA) contre Franz RICHTER (GER), par tombé
Demi-finaliste 2 : Riza KAYAALP (TUR) contre Beka KANDELAKI (AZE), 1-1

#JapanWrestling

L'ancienne star japonaise de lycée veut mettre les Samoa sur la carte de la lutte

By Ikuo Higuchi

(Note de la rédaction : le texte suivant est apparu sur le site internet de la Japan Wrestling Federation le 2 novembre. Il a été traduit et publié avec son autorisation.)

TOKYO -- Sur le calendrier japonais de la lutte, l'Open National non étudiant se situe bien en dessous du niveau des tournois majeurs tels que la Coupe de l'Empereur ou la Coupe Meiji, qui servent de qualificatifs pour les équipes mondiales et olympiques.

Il est donc rare de voir un futur membre de l'équipe olympique participer au tournoi. Pourtant, lors de l'évènement de cette année, qui se déroulait pour la première fois en 3 ans en raison de la pandémie, il y en avait un, bien que ce ne soit pas l'équipe japonaise que Gaku AKAZAWA souhaite intégrer pour les Jeux Olympiques Paris 2024.

Ancienne star de lycée, Akazawa a remporté le titre de lutte libre en 70kg en tant que membre d'une équipe de l'île du Pacifique nation de Samoa, qu'il espère représenter à Paris. 

Akazawa, âgé de 32 ans, dont la quête pour la gloire olympique comprenait un congé sabbatique de 4 ans en Russie, luttait dans son pays natal pour la première fois en trois ans à l'Open non étudiant qui s'est tenu du 29 au 30 octobre à Fujimi, Préfecture de Saitama, au nord de Tokyo.

Akazawa, qui n'a pas réussi à obtenir la nationalité samoane à temps pour les Jeux Olympiques de Tokyo, espère obtenir ses papiers à temps pour Paris. "Je n'ai jamais cessé de rêver de participer aux Jeux Olympiques," a-t-il déclaré. "Je ferai tous les efforts possibles pour devenir un olympien de Samoa."

JPNGaku Akazawa célèbre sa victoire en lutte libre 70kg pour l'équipe Samoa. (Photo par la Japan Wrestling Federation)

La dernière compétition d'Akazawa au Japon remonte aux Championnats All-Japan de la Coupe de l'Empereur 2016. La victoire à Fujimi était sa première où que ce soit depuis qu'il a remporté le titre national inter-lycées en 66kg en 2008, ce qui a fait de lui le tout premier champion national du Lycée Hanasaki Tokuharu dans la Préfecture de Saitama.

Son entraîneur à Hanasaki Tokuharu, Takuya TAKASAKA, était présent pour voir l'ancien prodige montrer son esprit combatif avec des victoires difficiles sur plusieurs adversaires avec des pedigrees. En demi-finale, Akazawa a battu le champion collégiale national 2018 Hayato OGATA 8-2, puis s'est emparé du titre avec une victoire 6-2 sur Kantaro YAMAZAKI, qui avait remporté les titres de printemps et d'automne de la ligue collégiale de l'est du Japon en 2018.

"Cela faisait longtemps que je n'avais pas lutté au Japon, aussi je n'avais aucune idée du niveau auquel j'étais," a déclaré Akazawa. "J'étais nerveux. En remportant le titre, j'ai pu me faire une idée de mon niveau et, honnêtement, je suis réellement très content."

Interrogé sur l'origine de sa ténacité et de son endurance qui lui ont permis de rallier les victoires, il a répondu, "Tous les matins et tous les soirs, parfois trois fois par jour, je m'entraîne intensément. Je pense que cela s'est vu aujourd'hui."

A Samoa, la lutte est encore loin d'être populaire et, avec la pandémie qui a limité les activités, il y a seulement 10 lutteurs âgés de plus de 14 ans dans tout le pays. La majorité des compétiteurs sont encore débutants et  il ne peut pas s'entraîner de manière à aiguiser ses compétences. "Au lieu de cela, je pense que j'ai pu gagner grâce à ma force physique," a-t-il déclaré.

JPN1Akazawa, à droite, pose avec les compétiteurs des championnats nationaux Samoans dans la capitale Apia en août 2021, où il officiait en tant qu'arbitre. (Photo avec l'aimable autorisation de Gaku Akazawa)

Depuis la Russie, avec détermination

L'Open non-étudiant, comme son nom l'indique, s'adresse à tous ceux qui ne sont pas à l'école et attire un large éventail de lutteurs aux parcours variés, des anciens champions du lycée à ceux qui ont commencé ce sport après avoir quitté l'université pour garder la forme et peut-être s'entraîner le week-end dans un club local.

Mais pour Akazawa, cela représente un défi directement lié au fait de se rendre à Paris. "Je n'avais pas lutté au Japon depuis longtemps, donc je pense qu'il y avait des gens qui pensaient que j'avais pris ma retraite," a-t-il déclaré avec un sourire.

Akazawa, qui a remporté le titre national junior de lycée et le titre JOC olympique junior, est venu à l'Université de Nihon University après son succès de Inter-High School, mais n'a pas été en mesure de le réitérer au niveau collègial. Plombé par des blessures, le dossier de Akazawa dans la base de données du site internet de la Fédération japonaise de lutte, qui répertorie tous les résultats, ne comporte aucune entrée pour ses années à Nihon.

Il ne fera sa première apparition à la Coupe de l'Empereur (organisée en décembre) qu'en 2013, l'année où il a obtenu son diplôme de Nihon. Il s'est classé cinquième en 60 kg.

N'abandonnant jamais son rêve olympique, il choisit une voie qui le mène vers l'une des principales puissances du sport, la Russie. Il s'est rendu à Krasnoyarsk, la ville sibérienne bien connue au Japon pour avoir accueilli le prestigieux Grand Prix Ivan Yarygin, pour poursuivre sa carrière.

Il n'avait pas de sponsor. À l'expiration de son visa, il retournait au Japon, faisait quelques petits boulots pour économiser de l'argent, puis retournait à Krasnoïarsk. Il a enduré cette vie instable pendant quatre ans, de 2013 à 2017, tout cela à cause de son amour pour ce sport et de son désir de devenir un champion olympique.

Mais peu importe son entraînement dans un pays de lutte de haut niveau, une telle instabilité dans sa vie quotidienne rendait certainement difficile la concentration sur le sport. Il est retourné au Japon pour participer à la Coupe de l'Empereur et à la Coupe Meiji (les championnats sur invitation du Japon, qui ont lieu au printemps), mais il n'a pas réussi à monter sur le podium.

Les Jeux olympiques semblaient plus éloignés que jamais. Mais son rêve ne s'est jamais évanoui. Ce qui a attiré son attention, c'est qu'un de ses copains lutteurs russes, au lieu de concourir pour l'équipe russe , avait changé de nationalité et s'était rendu aux Jeux olympiques de Rio en 2016.

Si une telle démarche est excessivement rare au Japon, elle n'est pas sans précédent. Un comédien mineur nommé Neko HIROSHI (neko signifie chat ; son vrai nom est Kuniaki TAKIZAKI) est devenu citoyen cambodgien pour pouvoir courir le marathon masculin aux Jeux olympiques de Rio en 2016.

Si son geste a attiré l'attention en tant que célébrité, il a également dû faire face à des critiques car son meilleur temps n'aurait même pas fait partie de l'équipe féminine japonaise. Il a terminé à la 138e place à Rio, à 37 minutes du vainqueur, avec un temps qui l'aurait placé à la 85e place chez les femmes.

Akazawa, dont le cas est différent dans la mesure où il est déjà au niveau mondial, a commencé à réfléchir à la manière dont il pourrait changer de nationalité. Il s'est mis à penser aux pays où il serait le plus facile de se qualifier et a été attiré par l'Océanie. Un professeur d'anglais de l'époque où il était au collège a été envoyé à Samoa dans le cadre d'un programme de l'Agence japonaise de coopération internationale en tant qu'instructeur de judo, et Akazawa a pris contact avec lui.

C'est à partir de ce moment-là qu'il s'est installé à Samoa en juin 2017.

JPN3Maulo Willie ALOFIPO, ancien joueur de rugby, a accompagné Akazawa au Japon et a terminé second dans les deux styles. (Photo par la Japan Wrestling Federation)

Faire passer le message à Samoa

Jerry WALLWORK, Président de la Fédération de lutte samoane, croit en l'enthousiasme et le dévouement d'Akazawa et lui apporte son soutien. L'année suivante, Akazawa épouse une infirmière locale nommée Sinevalley. Il a demandé un changement de nationalité en vue des Jeux olympiques de Tokyo, mais il n'est pas arrivé à temps. "C'est difficile d'obtenir la nationalité samoane", a déclaré Akazawa.

Akazawa gagne actuellement sa vie en tant que propriétaire d'un salon de massage, et peut poursuivre sa carrière de lutteur grâce au soutien de la fédération. Pour l'Open non-étudiant, Samoa était sorti du confinement et Akazawa a dû rentrer au Japon pour une affaire de famille, il a donc décidé de profiter de l'occasion pour participer au tournoi et voir où il en était.

Il devait être accompagné de deux lutteurs samoans, qui ont participé aux tournois individuels dans les deux styles. Le trio devait également participer à l'épreuve par équipe. Cependant, le père d'un des lutteurs est tombé malade et n'a pas pu faire le voyage, et l'équipe Samoa a dû se retirer.

Le lutteur restant, Maulo Willie ALOFIPO, a tiré le meilleur parti de son voyage, remportant des médailles d'argent dans les deux styles en 97 kg et acquérant une précieuse expérience internationale. Ce jeune homme de 25 ans était à l'origine un joueur de rugby et ne pratique la lutte que depuis deux ans.

"Il y a des points communs entre le rugby et la lutte", a dit Akazawa à Alofipo en le recrutant pour cette dernière. "Tu peux le faire juste une fois par semaine si tu veux, mais pourquoi ne pas essayer ?".

Alofipo a progressivement commencé à consacrer plus de temps à la lutte. Il s'entraîne le matin avant de se rendre à son travail la journée dans une plantation de cacao, puis retourne sur le tapis pour une séance du soir.  Il a fait ses débuts sur la scène internationale en août de cette année, terminant cinquième en lutte libre 97 kg aux Jeux du Commonwealth de Birmingham, en Angleterre.

Quant à sa deuxième place au tournoi du Japon, il a déclaré : "Je suis vraiment heureux. Le Japon est un pays de très haut niveau. C'est un plaisir de pouvoir se battre ici".

Interrogé sur son objectif à partir de maintenant, il a répondu : "Les Jeux olympiques".

Akazawa et Alofipo sont restés au Japon après le tournoi et prévoient d'y rester jusqu'à fin décembre. Akazawa a déclaré qu'ils s'entraîneront dans ses écoles d'origine, la Hanasaki Tokuharu High School et la Nihon University.

Bien que sa victoire lui ait valu une place à la Coupe de l'Empereur en décembre, Akazawa n'y a pas participé. Sa dernière incursion visait à tester son niveau actuel et, se considérant désormais comme un "Samoan", il a déclaré qu'il ne pouvait plus prétendre au titre de numéro un au Japon.

 JPN3Akazawa enregistre un tombé au deuxième tour des Championnats nationaux non-étudiants. (Photo par la Japan Wrestling Federation)

Construire une nouvelle puissance

Lorsqu'il a décidé dans quel lycée il irait, Akazawa a contourné les puissances de l'époque pour Hanasaki Tokuharu, qui était pratiquement inconnu dans le milieu de la lutte. "Plutôt que de me renforcer dans une équipe forte, je voulais aller dans une école sans nom et battre les puissances les unes après les autres", a-t-il déclaré à l'époque.

Et c'est à peu près ce qu'il a fait. Lors de sa troisième année en 2008, il a aidé Hanasaki Tokuharu à mettre fin au règne de 14 ans du lycée Kasumigaura de la préfecture d'Ibaraki lors du championnat des lycées du Kanto (le Kanto est la région du Japon qui comprend Tokyo et ses environs).

Kasumigaura prendra sa revanche plus tard lors de la finale par équipe des championnats inter-lycées, mais dans ce match, Akazawa a battu le champion national en titre (sur la photo du haut). Il s'est fait un nom et a aidé à lancer une nouvelle puissance sur la scène, quatre ans seulement après sa fondation.

L'énergie et l'enthousiasme qu'Akazawa ressent aujourd'hui à Samoa sont incroyablement similaires à "cette époque". Les Samoa bénéficient d'un climat chaud toute l'année, avec des températures moyennes de 23°C et de 31°C. La salle de lutte est une installation en plein air avec un toit, un peu comme dans le Japon d'une autre époque où chaque ville avait un ring de sumo extérieur situé à côté du sanctuaire local.

Alors que les salles de sport au Japon sont désormais climatisées, c'est un monde de différence à Samoa. "Chaque jour, je m'entraîne trempé de sueur", a déclaré Akazawa.

Le rugby est toujours roi à Samoa, et essayer d'augmenter la participation dans d'autres sports n'est pas une tâche facile. Mais des progrès ont été réalisés, puisque les Samoa ont été représentées aux Jeux olympiques en judo. Dans la lutte, la seule participation olympique de l'histoire du pays a eu lieu aux Jeux de Sydney en 2000, lorsque Faafatai IUTANA s'est qualifié dans la catégorie gréco-romaine des 76 kg. Les Samoa ont eu un bon nombre de médaillés d'or aux championnats d'Océanie, mais aucun depuis 2011. Le potentiel est donc là.

La réalisation de son propre rêve olympique sera un lien pour le développement de la lutte à Samoa. Pour l'instant, alors qu'il attend de savoir s'il obtiendra la citoyenneté, Akazawa continuera à concentrer tous ses efforts pour Paris. La plupart de ses coéquipiers du lycée ont depuis longtemps quitté le tapis et ont suivi la voie de l'entraînement. Mais au moins l'un des membres de la "promotion 2008" a toujours une passion brûlante pour les Jeux olympiques.

-- Traduction anglaise par Ken Marantz