Japon

Attendance réduite et sécurité pour la reprise des camps d'entraînement de l'équipe nationale japonaise

By Ken Marantz

TOKYO―Il y avait quelque chose d'inhabituel lors du lancement du camp d'entraînement de l'équipe du Japon - entre autres choses, seuls huit athlètes étaient présents.

Mais nous sommes dans une époque troublée. Le fait que le Japon ait finalement pu, au milieu d'une pandémie mondiale, remonter sur les tapis pour la première fois en 3 mois et demi constitue une avancée majeure pour le pays hôte des prochains Jeux Olympiques repoussés d'un an, qui peut ainsi commencer sa préparation à long terme.

Yukako et Risako KAWAI se désinfectent les mains à l'entrée de la salle de lutte du Centre national d'entraînement (CNE) de Tokyo. (photo : Sachiko Hotaka/JWF)

"Je suis vraiment heureuse de revoir les membres de l'équipe nationale après si longtemps," a déclaré Yukako KAWAI, l'une des quatre lutteuses de l'équipe olympique participant au camp féminin qui a commencé le jeudi 2 juillet. "Nous avions habituellement un camp par mois et même si nous ne sommes pas retournés à la normale, je suis contente de pouvoir à nouveau lutter ici."

Respectant les volumineuses directives soigneusement établies par le comité des sciences sportives de la Fédération japonaise de lutte, les camps du Centre national d'entraînement de Tokyo suivront de strictes protocoles afin de prévenir la diffusion du coronavirus, dont les effets sur le monde du sport sont dévastateurs.

En addition aux directives habituelles de port de masque, de lavage des mains et d'utilisation de désinfectant, ces directives appellent également à limiter le nombre de personnes présentes dans la salle de lutte à un moment donné. Ceci est obtenu par l'organisation différenciée des camps par style de lutte avec un minimum de période de chevauchement, en invitant principalement ceux et celles déjà en possession d'une place olympique ou qui seront parties prenantes des qualificatifs olympiques.

"Les camps d'entraînement - de lutte féminine, gréco-romaine et libre - n'ont pas pour but d'améliorer le niveau," a déclaré le directeur national du développement technique Shigeki NISHIGUCHI. "Ces camps visent spécifiquement les JO de Tokyo. Nous en avons donc limité le nombre, particulièrement pour juillet. Selon les circonstances, nous espérons être capables d'augmenter la fréquence en août et septembre. Mais le principal est de faire barrière au coronavirus."

Les athlètes conservent depuis le 16 juin le relevé quotidien de leur température corporelle, de leur santé générale et de tout contact externe qu'ils ont pu avoir. Tous ont fait un test d'anticorps avant le camp et, à l'exception d'une course rapide à un commerce de proximité, ils n'ont en principe pas le droit de quitter le centre.

Le camp de lutte féminine est le premier, du 2 au 8 juillet, suivi par la lutte gréco-romaine du 6 au 11 et par la lutte libre du 23 au 28. Un camp par mois sera organisé pour chaque style en août et septembre prochains, également presque séparément.

Yui SUSAKI par en ramassement lors d'un exercice d'amené au sol. (photo : Sachiko Hotaka/JWF)

Quatre des cinq membres de l'équipe olympique de lutte féminine - les championnes en titre Risako KAWAI (57kg), Sara DOSHO (68kg), la petite soeur de Risako Yukako (62kg) et Hiroe MINAGAWA (76kg) - ont rejoint les six tapis de la salle de lutte du CNE jeudi dernier, ainsi que la double championne du monde Yui SUSAKI (50kg) qui espère obtenir un billet olympique lors du qualificatif Asie prévu en mars prochain. Trois autres personnes étaient également présentes.

Absente du quintet olympique, la médaillée mondiale d'argent Mayu MUKAIDA (53kg), récemment diplômée de la fameuse université de Shigakkan. Elle a rejoint la firme de haute technologie JTEKT en tant qu'athlète sponsorisée et a des engagements envers cette entreprise. 

Hors les coaches, le personnel et les officiels de la Fédération, les seuls personnes permises dans la salle de lutte sont l'équipe du website de la Fédération japonaise et un correspondant UWW. Les médias japonais ont pu observer l'entraînement en streaming, et tenir une "conférence de presse" avec chaque lutteuse après la session.

Chaque personne pénétrant dans la salle devait se désinfecter les mains et avait sa température prise. Les lutteuses ont également désinfecté les semelles de leurs chaussures de lutte. Tous, coaches compris sauf les lutteuses en exercice, portaient constamment des masques.

À ce stade, la politique de la Fédération est de commencer doucement et d'augmenter la cadence en vue des Jeux Olympiques, faisant ce qui est possible pour éviter des blessures. La session ne comportait ainsi pas de lutte en direct. La première heure était faite d'étirements et de montée en pression des muscles principaux, suivis d'exercices tels que des ramassements de jambe par l'extérieur, des amenés au sol et des ceintures en pont. L'ambiance était relaxée mais concentrée sur les exercices à réaliser.

"Il y a encore un an et un mois avant les JO, alors nous voulons solidement consolider les fondamentaux et éviter les blessures," dit Nishiguchi. "Nous commençons par les choses fondamentales. Les lutteuses ont peut-être l'impression que ce n'est pas assez. Mais il n'y a aucune raison d'aller plus vite que la musique."

Sara DOSHO travaille un exercice de renforcement. (photo : Sachiko Hotaka/JWF)

Les éclopées
Ironiquement, alors qu'éviter les blessures est la priorité, trois des lutteuses olympiques souffrent actuellement de divers handicaps. En fait, Minagawa a profité du repos forcé pour subir une opération du genou tandis que  Dosho, qui délare s'être complètement remise de son opération à l'épaule de début 2019, continue à soigner un genou mal en point ; et Risako Kawai s'est faite un tour de reins.

"C'est une situation chronique depuis à peu près un an," dit Minagawa, médaillée mondiale d'argent en 2019, au sujet de son genou droit dont elle a subi l'ablation du ménisque. "C'était particulièrement dur en mars. Avec les JO [originellement] en août, il était impossible d'avoir une opération. Je pensais continuer et juste ignorer le problème, puis le report a été décidé."

Nishiguchi remarque que pour quelques personnes comme Minagawa, il y a un côté positif au report des JO pour cause de pandémie, puisque cela leur donne une année pour récupérer de leurs blessures.

Lors du pic de la pandémie au Japon, de début avril à début mai, le gouvernement avait déclaré l'état d'urgence, ce qui ne lui avait cependant pas permis d'imposer la fermeture des magasins, l'utilisation des masques ou la distanciation sociale. Mais les gouverneurs des préfectures du pays ont pu demander que de telles mesures soient respectées volontairement, un auto-confinement largement suivi par le public.

Comme les autres, Minagawa était alors obligée de se contenter de s'entraîner à la maison et de courir à l'extérieur car aucune salle de lutte ou de gym n'était restée ouverte.

"Pendant cette période d'auto-confinement, je devais rester à la maison et mentalement, ce fut difficile," dit-elle. "Récemment, l'état d'urgence a été levé, j'ai donc pu sortir plus et les camps nationaux ont rouvert, ce qui m'a aidé à remonter la pente. Je suis plus à même de regarder devant positivement."

Dosho dit qu'elle ressent encore quelques douleurs dans son genou, et que le soutien qu'elle reçoit allège le désagrément. Après avoir échoué à obtenir une médaille au championnat du monde, elle reste déterminée à faire amende honorable en devenant championne olympique encore une fois.

"Mon objectif de remporter une médaille d'or n'a pas changé d'un iota," dit-elle. "Je crois que tout ira bien si je reste patiente et y vais doucement à l'entraînement."

Risako KAWAI soulève la jambe de sa partenaire lors d'un exercice d'amené au sol. (photo : Sachiko Hotaka/JWF)

Et maintenant elle cuisine
Pour Risako Kawai, qui a remporté son quatrième titre mondial en septembre dernier à Noursoultan, rester à la maison lui a donné la possibilité d'apprendre quelque chose du monde réel, extérieur à celui du sport - comme comment cuisiner.

"Depuis le lycée, j'ai toujours pris mes repas au dortoir, et même après avoir terminé l'université, je pouvais manger là-bas," dit-elle. "Mais pendant la période d'auto-confinement, nous ne pouvions pas bouger. C'est la première fois que je devais préparer mes propres repas pour une si longue durée, même à mon âge."

Déclarant qu'elle a aussi fait du Pilate pour la première fois, Kawai a trouvé des recettes sur internet.

"Je n'avais jamais préparé de repas frits, mais j'ai pu faire un essai," dit-elle. "Plutôt que me concentrer sur une spécialité, j'ai tenté différentes choses."

Sa petite soeur Yukako, comme Risako un produit de Shigakkan, a eu du mal a s'éloigner de la vie couvée de l'université. "J'ai vraiment apprécié ma mère, qui nous préparait nos repas," dit-elle. 

Shigakkan a récemment réouvert ses installations et les Kawai ont pu remonter sur les tapis avant les camps nationaux, mais sans lutte active. 

"Naturellement, ma force a diminué par rapport à d'habitude," dit Risako. "Mais je ne ressens aucun changement dans mon rapport à la lutte."

Quant à remonter sur les tapis, ajoute-t-elle, "C'est la première fois depuis longtemps que les coaches m'observent travailler avec une partenaire. C'est un sentiment rafraîchissant." 

Elle dit qu'elle a récupéré à 80% son problème de dos et prend soin de ne pas rechuter. Lors des exercices de son premier entraînement, elle n'a pas fait de lutte au sol.

Yukako KAWAI takes down her practice partner. (photo by Sachiko Hotaka/JWF)

Les cheveux aujourd'hui et demain, loin
Parmi les principaux sujets de conversation du camp ne concernant pas la lutte, le nouveau look de Yukako Kawai était en première ligne : elle a surpris tout le monde pour avoir fait une coupe au bol de sa longue chevelure.

"C'est la première fois depuis l'école primaire que j'ai cette longueur," dit-elle. "C'est nouveau pour moi."

Kawai déclare qu'elle a coupé ses boucles juste avant le début de la période d'auto-confinement en mars, avant que les salons de coiffure ne ferment.

"J'ai toujours voulu les couper mais je n'en ai jamais eu le courage," ajoutant qu'elle avait pris cette résolution suite à un incident à New Delhi en février. "Au championnat d'Asie, on m'a tiré les cheveux. C'est là que j'ai décidé que j'en avais assez."

"A l'époque, les JO n'avaient pas encore été reportés. J'ai pensé que ce serait radical pour me mettre dans l'esprit du sprint vers les Jeux."

Ses courtes tresses ne sont pas le seul nouvel aspect de la vie de Kawa. Comme Mukaida, elle a obtenue son diplôme de Shigakkan pour rejoindre une compagnie avec un contrat qui lui permet de continuer à se dédier complètement à la lutte. Elle rejoint Risako comme employée de Japan Beverage, qui emploie également la lutteuse maintenant retraitée plusieurs fois championne du monde et médaillée olympique Kyoko HAMAGUCHI. 

"Jusqu'à maintenant, j'étais dans l'équipe de lutte en tant qu'étudiante," commente Kawai.. "Aujourd'hui la lutte est mon métier. C'est mon métier d'obtenir des résultats et de rembourser l'entreprise. Je ressens plus de responsabilité qu'avant. Je dois faire preuve de plus de discernement sur mes performances. Je suis reconnaissante qu'ils m'offrent le même environnement de lutte qu'auparavant, et je veux réussir et que mon entreprise sois contente."

Tandis que le programme international de lutte reste dans les limbes, Kawai déclare qu'elle ne se sent pas concernée par l'absence de tournoi spécidique pour lequel elle se préparerait au camp national. 

"Je n'y ai pas vraiment pensé," dit-elle. "Je pose un objectif pour chaque jour d'entraînement et je pense à comment l'atteindre. Plutôt que sur les tournois, je travaille à dépasser les problèmes que je peux avoir."

#JapanWrestling

L'ex médaillé olympique Ota continue sa mission d'ouvrir le tapis de lutte aux personnes atteintes du syndrome de Down (trisomie 21)

By Ikuo Higuchi

(Note de l'éditeur : Ce qui suit est une version éditée d'une série en 2 parties qui est apparue sur le site internet de la fédération japonaise de lutte le 18 janvier avec des extraits des histoires précédentes. Elle a été traduite et publiée avec la permission de l'auteur.)

"A travers la lutte, la société peut être changée. La lutte peut donner du courage aux personnes atteintes du syndrome de Down."

Au deuxième étage d'un immeuble quelconque à proximité du Tokyo Dome, au coeur de la ville, les membres du club se sont rassemblés dans une petite salle d'arts martiaux équipée d'un tapis de sol pour reprendre les activités qui, pour certains, remonte à la création du club en 2005.

Inévitablement suspendu durant la pandémie, le club de lutte Waku-waku -- spécifiquement destiné à ceux ayant le syndrome de Down -- a a repris mi-janvier au centre de Tokyo, poursuivant la mission de son fondateur de permettre aux personnes atteintes du syndrome de Down de devenir plus affûtées physiquement et émotionnellement, et de leur donner espoir en la vie.

Le club ("waku-waku" est une expression onomatopéique du sentiment d'excitation) est l'oeuvre de la vie de Takuya OTA, médaillé de bronze des Jeux olympiques d'Atlanta en 1996 en lutte libre 74kg.  "C'est devenu une partie de ma vie," a déclaré Ota âgé de 53 ans, qui, après avoir été longtemps entraîneur à l'université de Waseda, est actuellement entraîneur en chef à l'université Chuo. "Je puise mon énergie pour continuer auprès de ces enfants."

La flamme de l'intérêt d'Ota à aider les personnes atteintes du syndrome de Down s'est allumée après avoir été profondément ému par le livre "Tatta Hitotsu no Takaramono (Le seul et unique trésor)," le récit d'une mère qui a élevé un fils atteint de cette maladie publié en 2004. Le livre de Hiromi Kato a fait l'objet d'une fiction télévisée intitulée "The One and Only (le seul et unique)," qui a remporté le prix de la Télévision Asiatique pour une fiction en 2005.

Quand Ota a débuté le projet, il travaillait déjà à temps plein comme entraîneur des compétiteurs de classe mondiale à Waseda, l'équipe la plus ancienne du Japon. Il avait également lancé le club Waseda Club pour les enfants, animé par sa volonté de faire connaître les merveilles de la lutte au plus grand nombre.

Selon le site internet de la clinique Mayo, le syndrome de Down est une "maladie génétique" due à la division anormale de cellules durant la grossesse. Le matériel génétique supplémentaire qui en résulte engendre " les changements de développement et les caractéristiques physiques du syndrome de Down."

Elle touche 1 nouveau-né sur mille et sa gravité est variable. Le site internet stipule : "Une meilleure compréhension du syndrome de Down et des interventions précoces peuvent grandement accroître la qualité de vie des enfants et des adultes atteints de cette maladie et les aider à mener une vie épanouie."

Après avoir lu le livre de Kato, Ota a commencé à se dire, "Que se passerait-il si je leur faisais essayer la lutte ?" Pour ceux qui sont souvent négligés ou ignorés par la société et souffrent de préjugés non informés, la lutte ne pourrait-elle pas être un moyen de les aider à leur donner plus de valeur à leur vie ?

En juillet 2005, il a créé son premier club de lutte spécifiquement à cet effet, prenant sous son aile un groupe inaugural de six enfants.

Cela ne veut pas dire qu'il n'y avait pas de préoccupations initiales. les enfants atteints du syndrome de Down ne sont pas du même niveau physique que leurs camarades en bonne santé, et certains avaient une colonne vertébrale qui ne pouvaient supporter les rigueur de la lutte. Pouvaient-ils faire de la lutte ? Mais il n'y avait pas moyen de savoir avant qu'ils n'essaient et Ota voulait leur donner leur chance.

Et quand ils en ont eu l'occasion, ils ont montré qu'ils pouvaient se déplacer comme les autres. Pas vraiment au début mais à mesure qu'ils se sont habitués, ils ont gagné en force et confiance. Ils ont commencé à comprendre les règles et ont appris les techniques tandis qu'Ota mettait la priorité sur la sécurité et arrêtait toute action potentiellement dangereuse.

Ota
Comme pour n'importe quel entraînement de lutte au Japon, l'entraîneur Takuya Ota s'adresse aux lutteurs avant le début du combat. Le club de lutte Waku-Waku a repris en janvier pour la première fois depuis le début de la pandémie. (Photo: Japanese Wrestling Federation)

Faire participer de grands noms

Aucun observateur n'a peut-être été plus surpris et heureux par la réussite de ce projet que les parents. Ils pouvaient voir leurs enfants qui avaient été pour la plupart écartés des sports, faire de l'exercice, prendre du plaisir et, le plus important, renforcer leur estime de soi.

En 2017, la championne du monde en titre et future médaillée d'or olympique Yui SUSAKI était en première année à Waseda quand elle a offert de son temps au club de lutte Waku-waku.

"J'ai pris connaissance de la lutte Waku-waku par le site internet de la fédération et d'autres sources," a déclaré Susaki. "Je me suis dit qu'après être entrée à l'université, je voulais m'impliquer, alors j'ai participé aux entraînements une fois par mois en tant qu'entraîneur. Tout le monde à Waku-waku a un amour pur pour la lutte et chaque fois cela m'a stimulé aussi," a-t-elle ajouté, une lueur dans les yeux.

Yui SUSAKI (JPN)La future championne olympique Yui SUSAKI et le médaillé d'argent des JO de Pékin Kenichi YUMOTO posent avec deux fiers participants à la Waku-waku Waseda Cup 2017. (Photo: Japan Wrestling Federation)

Kenichi YUMOTO, médaillé d'argent en lutte libre 60kg aux Jeux Olympiques de Beijing 2008 est également monté à bord prêter main forte à Ota -- Ils sont tous les deux natifs de la Préfecture de Wakayama et anciens étudiants de l'université nippone des sciences du sport. Yumoto a fait sentir sa présence lors des entraînements, enseignant patiemment les techniques.

Le club a continué sans relâche jusqu'à ce que la pandémie de coronavirus frappe le monde en 2020, n'épargnant aucun sport. Le contrat d'Ota venait juste de se terminer à Waseda et il partait pour l'université de Chuo aui est située à la banlieu de Hachioji à l'ouest de Tokyo. Le club s'est donc retrouvé sans la salle de lutte de Waseda et, combiné à la pandémie a engendré un arrêt des opérations.

L'assouplissement récent des restrictions liées à la pandémie au Japon a permis au club de redémarré et Ota a eu de la chance de pouvoir utiliser la salle des arts martiaux à proximité du Tokyo Dome dans le quartier de Bunkyo.  Ce fût un moment spécial pour toutes les personnes concernées.

"Les personnes atteintes du syndrome de Down sont fondamentalement opposées aux sports de combat," a-t-il déclaré. "Mais lorsqu'ils continuent à en faire, je constate que leur esprit combatif ressort. j'entends des parents dire 'Il n'est plus timide' ou 'Il est devenu capable de faire des choses tout seul.' J'ai l'impression que les parents sentent aussi qu'en luttant, ils ont un potentiel illimité de développement personnel."

Bien qu'il n'y ait eu que cinq participants le premier jour du redémarrage du club, la salle était remplie d'une énergie positive, depuis les sourires sur leur visage lorsqu'ils pratiquaient des mouvements jusqu'à la façon dont ils levaient fièrement leur main lorsqu'on leur demandait d'être partenaire de jeu.

Parmi ceux qui sont montés sur le tapis se trouvait Aruban Kubota âgé de 24 ans, qui a été des premiers membres du club en 2005 alors qu'il était en première année d'école primaire. Kubota, dont le prénom provient du pays natal de son père, l'Albanie, est actuellement employé dans un centre d'aide sociale.

"Au début, il s'asseyait toujours sur le côté à l'entraînement", se souvient sa mère, Rimiko. "Mais avant que nous le sachions, il a commencé à se joindre au groupe et à décider des choses par lui-même. Il a commencé à agir de son propre chef."

Rimiko dit que l'attente pour que le club redémarre semblait interminable. "Je suis tellement reconnaissante envers le coach Ota", déclare-t-elle.

En juillet 2009 , Ota, désireux de donner aux membres une chance de mettre leurs nouvelles compétences à l'épreuve comme tous les lutteurs, a organisé la "1ère Coupe Waseda". D'autres clubs pour enfants trisomiques avaient vu le jour, principalement sous l'impulsion d'Ota et de ses relations de lutte, et le tournoi a attiré 29 participants de trois clubs..

Le tournoi, qui sera plus tard rebaptisé "Waku-waku Waseda Cup" et sera parrainé par une entreprise employant d'anciens lutteurs de Waseda, attire des participants allant des enfants aux adultes d'une vingtaine d'années. Le niveau continue de s'améliorer et, contrairement aux premières années où il était difficile pour les participants de contrôler leurs émotions, les matchs ne sont plus interrompus et peuvent se dérouler sans heurts.

"Au début, notre objectif principal était simplement de les amener à pouvoir aller sur le tapis par eux-mêmes", a déclaré Ota dans une interview après le tournoi 2016. "Maintenant, ils comprennent les règles et peuvent avoir ce que nous considérons comme un match régulier."

Tous les participants reçoivent une médaille, mais le point culminant de la cérémonie de remise des prix est la sélection du MVP et du Fighting Spirit Award qui sont accompagnés d'un trophée. Alors qu'Ota tient le micro avant de faire l'annonce, les gagnants (qui sont éligibles pour le MVP) le regardent comme s'ils étaient en prière tandis que toute la salle prend une atmosphère de sourires

Ota2Un membre du club fait un exercice de double-leg takedown sous le regard des autres. (Photo: Japanese Wrestling Federation)


Viser les Jeux olympiques spéciaux

Comme en témoigne l'enthousiasme suscité par les Jeux paralympiques de Tokyo en 2021, le sport n'est pas l'apanage des personnes valides. Les personnes atteintes du syndrome de Down ou d'autres déficiences intellectuelles font également des progrès dans la pratique du sport.

En octobre 2020, une compétition d'athlétisme réservée aux personnes atteintes du syndrome de Down s'est tenue à Miyazaki, dans le sud du Japon, et plus tôt cette année, une division pour les participants atteints du syndrome de Down a été mise en place pour la première fois lors d'une rencontre de natation à Chiba, à l'est de Tokyo.

À l'échelle internationale, Virtus, une organisation créée pour le développement du sport d'élite dans le monde entier pour les athlètes souffrant de déficiences intellectuelles, avait inscrit le judo au programme des 1ers Jeux Océanie/Asie qui se sont tenus en novembre de l'année dernière en Australie. Des athlètes japonais y ont participé, élargissant ainsi le champ des possibilités pour les personnes atteintes du syndrome de Down.

Ota regarde également au-delà des côtes japonaises. Le prochain objectif d'Ota est de faire entrer la lutte dans les Jeux olympiques spéciaux, qui ont une histoire de plus de 50 ans et diffèrent des Jeux paralympiques en ce qu'ils s'adressent spécifiquement aux personnes souffrant de déficiences intellectuelles. Actuellement, il y a plus de 20 sports dans les Jeux olympiques spéciaux, dont le judo.

Ota s'est rendu au siège de Washington, D.C., où on lui a dit que pour que la lutte soit incluse, il était nécessaire que le sport se développe au Japon et que davantage de pays dans le monde lancent des programmes. La lutte étant encore en pleine évolution et peu connue au Japon, il s'agit d'un obstacle de taille à franchir.

Mais il ne se laisse pas décourager. "Même si vous avez un handicap, tant qu'il existe un sport offrant une scène pour briller, on peut avoir une grande présence dans la société", a déclaré Ota.